Importance de la communcication du dossier administratif à un fonctionnaire avant toute mesure de l'administration
Par une jugement N°s 1904349, 2000220 en date du 26 octobre 2021, le tribunal administratif de Nîmes a justement considéré que :
Mme X, professeure des écoles de classe normale depuis le 26 septembre 1996, a été affectée, le 1er septembre 2017 comme directrice de l’école primaire La Combe aux Taillades. En raison des tensions au sein de l’équipe enseignante de cette école, le recteur de l’académie d’Aix-Marseille a décidé, le 12 décembre 2017, de l’affecter à l’école maternelle Louis Leprince-Ringuet de Cavaillon, en tant qu’enseignante de classe préélémentaire sur la période allant du 11 décembre 2017 au 31 août 2018. Durant l'année scolaire 2018-2019, la requérante a été affectée à titre provisoire à l'école maternelle La Colline à Cavaillon du 1er septembre 2018 au 31 août 2019. Par arrêté du 19 juin 2019, le recteur de l’académie d’Aix Marseille l’a affectée à titre provisoire, par affectation annuelle, à compter du 1er septembre 2019, à l’école élémentaire des Amandiers à Gordes. Puis, par une décision du 28 juin 2019, le directeur académique des services de l’Education nationale de Vaucluse a informé Mme X de son affectation à la rentrée scolaire à l’école primaire de Gordes. Mme X demande l’annulation de cette décision dans la requête n° 1904349. Par une décision du 18 novembre 2019, le directeur académique des services de l’Education nationale de Vaucluse l’a informée de sa décision de la retirer de la liste d’aptitude des directeurs d’école et de son emploi de directrice d’école. Mme X demande l’annulation de cette décision dans la requête n° 2000220.
Sur les conclusions à fin d’annulation :
En ce qui concerne la décision du 28 juin 2019 :
Il ressort des pièces du dossier que la décision en litige n’a pas été prise à la demande de Mme X, celle-ci s’étant au contraire abstenue de s’inscrire dans le mouvement de mutation pour l’année 2019-2020. Elle s’accompagne d’un changement de résidence administrative et est ainsi soumise aux dispositions précitées des articles 60 de la loi du 11 janvier 1984 et 65 de la loi du 22 avril 1905. S’il ressort des pièces du dossier que par un courrier du 15 avril 2019, le directeur académique a réitéré sa demande à Mme X de participer au mouvement départemental 2019 afin de ne pas raviver les tensions dans l’école des Taillades, il ne saurait en être déduit que l’intéressée ne pouvait ignorer la volonté de l'administration de procéder à un changement de son affectation d’office dans l’intérêt du service. Ainsi, la requérante n’a été informée explicitement, ni de ce qu’une mutation d’office dans l’intérêt du service était envisagée à son égard, ni de ce que sa situation serait examinée le 18 juin 2019 par la commission administrative paritaire, et elle n’a pas été invitée à consulter son dossier préalablement à l’adoption de la décision du 28 juin 2019 l’affectant sur le poste d’adjoint élémentaire à titre provisoire de l’école primaire de Gordes. Dans ces conditions, la décision contestée n’ayant pas été précédée de la communication de son dossier à l’intéressée, cette dernière a été privée d’une garantie.
Il résulte de ce qui précède, et sans qu’il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de la requête, que Mme X est fondée à demander l’annulation de la décision du 28 juin 2019.
En ce qui concerne la décision du 18 novembre 2019
La décision du 18 novembre 2019 portant retrait de l’emploi de directeur d’école étant une mesure prise en considération de la personne, Mme X devait être mise à même de demander la communication de son dossier préalablement à la mesure édictée. Or, il ressort des pièces du dossier que Mme X n’a été informée de la possibilité de consulter son dossier administratif que par la décision attaquée du 18 novembre 2019, et non préalablement à l’édiction de celle-ci. Dans ces conditions, elle est fondée à se prévaloir d’un vice de procédure l’ayant privé d’une garantie.
9. Il résulte de ce qui précède, sans qu’il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de la requête, que Mme X est fondée à demander l’annulation de la décision du 18 novembre 2019.
Cette décision de justice est une confirmation de certains principes généraux du droit et des textes applicables en matière de fonction publique :
1) Aux termes de l’article 60 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l’Etat, dans sa version en vigueur à la date des arrêtés contestées :
« L’autorité compétente procède aux mouvements des fonctionnaires après avis des commissions administratives paritaires. / Dans les administrations ou services où sont dressés des tableaux périodiques de mutations, l’avis des commissions est donné au moment de l’établissement de ces tableaux. / Toutefois, lorsqu’il n’existe pas de tableaux de mutation, seules les mutations comportant changement de résidence ou modification de la situation de l’intéressé sont soumises à l’avis des commissions. (…) »
2) Et aux termes de l’article 65 de la loi du 22 avril 1905 :
« Tous les fonctionnaires civils et militaires, tous les employés et ouvriers de toutes administrations publiques ont droit à la communication personnelle et confidentielle de toutes les notes, feuilles signalétiques et tous autres documents composant leur dossier, soit avant d’être l’objet d’une mesure disciplinaire ou d’un déplacement d’office, soit avant d’être retardé dans leur avancement à l’ancienneté. »
3) "si les actes administratifs doivent être pris selon les formes et conformément aux procédures prévues par les lois et règlements, un vice affectant le déroulement d’une procédure administrative préalable, suivie à titre obligatoire ou facultatif,
n’est de nature à entacher d’illégalité la décision prise que s’il ressort des pièces du dossier qu’il a été susceptible d’exercer, en l’espèce, une influence sur le sens de la décision prise ou qu’il a privé les intéressés d’une garantie".
4) Aux termes de l’article 11 du décret du 24 février 1989 relatif aux directeurs d’école :
« Les instituteurs nommés dans l'emploi de directeur d'école peuvent se voir retirer cet emploi par l'inspecteur d'académie, directeur des services départementaux de l'éducation nationale, dans l'intérêt du service, après avis de la commission administrative paritaire départementale unique compétente, à l'égard des instituteurs et des professeurs des écoles. ».
5) Aux termes de l’article 65 de la loi du 22 avril 1905 :
« Tous les fonctionnaires civils et militaires, tous les employés et ouvriers de toutes administrations publiques ont droit à la communication personnelle et confidentielle de toutes les notes, feuilles signalétiques et tous autres documents composant leur dossier, soit avant d’être l’objet d’une mesure disciplinaire ou d’un déplacement d’office, soit avant d’être retardés dans leur avancement à l’ancienneté. ».
Au cas d'espèce, l'administration doit reprendre une décision qui ne soit pas affectée d'un vice de procédure.
Sur les conclusions à fin d’injonction :
Le présent jugement, qui accueille les conclusions à fin d’annulation présentées par Mme X à l’encontre des décisions des 28 juin et 18 novembre 2019, et eu égard au motif de ces annulations, implique nécessairement le réexamen de la situation de l’intéressée au terme d’une procédure régulière pour chacune de ces deux décisions. Il y a lieu d’enjoindre au recteur de l’académie d’Aix-Marseille de procéder à ce réexamen, dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent jugement.
En conclusion, il en résulte que le non-respect des droits de la défense et celui de la règle de communication du dossier ne peuvent qu’entraîner l'annulation de la décision attaquée.
En tout état de cause, il n’en demeure pas moins qu’avant de prendre une mesure prise en considération de la personne et même dans l'intérêt du service, l'administration est tenue de mettre l'agent concerné à même de demander la consultation de son dossier.
Le jugement précité sanctionne, à bon droit, l'administration qui n'a pas respecté les règles de procédure adéquates.
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